Après l’ordonnance « coquilles » relatives à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018, voici le projet de loi correctif ! Le gouvernement profite d’un avant-projet de loi ratifiant diverses ordonnances de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel pour adopter quelques nouvelles mesures sociales.
Le texte ratifie trois ordonnances :
- l’ordonnance « coquilles » ;
- l’ordonnance qui transpose la directive du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 qui modifie la directive relative au détachement de travailleurs dans le cadre d’une prestation de services ;
- l’ordonnance du 28 août 2019 qui adapte les dispositions de la loi Avenir professionnel aux collectivités d’outre-mer et à Saint-Barthelémy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le texte introduit par ailleurs de nouvelles dispositions dans le code du travail, assez hétéroclites.
Actuellement, pour apprécier la représentativité syndicale au niveau de tout ou partie du groupe, il faut appliquer les règles de la représentativité syndicale au niveau de l’entreprise, par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans les entreprises ou établissements concernés.
Si le périmètre des entreprises ou établissements compris dans le champ d’un accord de groupe est identique à celui d’un accord conclu au cours du cycle électoral précédant l’engagement des négociations, la représentativité des organisations syndicales est appréciée par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans les entreprises ou établissements concernés. Ce n’est qu’à défaut, que la représentativité est appréciée par addition de l’ensemble des suffrages obtenus lors des dernières élections organisées dans les entreprises ou établissements compris dans le périmètre de l’accord.
L’avant-projet décide que ce sera désormais la règle dans tous les cas en supprimant la première possibilité.
Le texte modifie une autre disposition. Aujourd’hui, le ministre du travail arrête la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche professionnelle et des organisations syndicales reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel. L’avant-projet de loi prévoit une exception à cette règle en permettant au ministre du travail de dresser une liste d’organisations syndicales reconnues représentatives au sein de périmètres constitués de plusieurs branches professionnelles ayant des activités économiques identiques.
L’avant-projet de loi prévoit également qu’en cas de négociation d’accords interbranches, le taux de validité d’au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations syndicales reconnues représentatives est apprécié à l’échelle de chacune des branches comprises dans le périmètre de cet accord.
Dans le cadre d’un grand licenciement économique dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le CSE doit être informé et consulté relativement à l’opération projetée et ses modalités d’application. L’avant-projet de loi précise qu’il doit également l’être sur les conséquences de l’opération projetée en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail.
Lorsque le licenciement est nul pour inobservation des règles relatives à la protection de la grossesse, de la maternité ou de la paternité, l’employeur devra verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité.
L’article L.2261-33 du code du travail prévoit qu’en cas de conclusion d’un accord collectif regroupant le champ de plusieurs conventions existantes, les dispositions conventionnelles applicables avant la fusion sont remplacées par des stipulations communes dans un délai de cinq ans à compter de la date d’effet de la fusion ou du regroupement. Pendant ce délai, la branche issue du rapprochement peut maintenir plusieurs conventions collectives.
L’avant-projet de loi permet à l’accord collectif de porter ce délai à sept ans.
Le texte prévoit – s’agissant du franchissement du seuil de 300 salariés dans le cadre des dispositions relatives au CSE – que ce seuil est réputé franchi lorsque l’effectif de l’entreprise dépasse ce seuil pendant 12 mois consécutifs. L’employeur dispose alors d’un délai d’un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer complètement aux obligations qui en découlent.
Actuellement, l’article L.2314-9 du code du travail prévoit que lorsque le CSE n’a pas été mis en place ou renouvelé, un procès-verbal de carence est établi par l’employeur. L’employeur doit alors porter à la connaissance des salariés par tout moyen permettant de donner date certaine à cette information, le procès-verbal dans l’entreprise et le transmet dans les quinze jours, par tout moyen permettant de conférer date certaine à l’inspecteur du travail. Ce PV devra désormais être communiqué au ministère du travail.
L’article L.4141-2 du code du travail prévoit actuellement une formation pratique à la sécurité aux salariés que l’employeur embauche, qui changent de poste de travail ou de technique, aux salariés temporaires à l’exception de ceux auxquels il est fait appel en vue de l’exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité et déjà dotés de la qualification nécessaire à cette intervention ou, à la demande du médecin du travail, des travailleurs qui reprennent leur activité après un arrêt de travail d’une durée d’au moins 21 jours.
L’avant-projet de loi précise que cette formation doit viser à « favoriser l’exercice d’un geste professionnel sûr garantissant tant la sécurité du travailleur que celle de ses collègues et des tiers, et évitant l’altération de leur santé physique et mentale. La formation devra prendre en compte les dimensions propres à l’exercice de fonctions d’encadrement. Elle doit permettre de faire face à l’évolution des risques liés aux changements de poste ou aux évolutions des techniques, outils et méthodes de travail. Elle doit tenir compte des formations préalables, de la qualification, de l’expérience professionnelle et de la langue, parlée ou lue, du travailleur appelé à en bénéficier ».
Le texte étend le champ de la préparation opérationnelle à l’emploi (POE) à toute personne en recherche d’emploi et aux travailleurs handicapés employés dans une entreprise adaptée. Actuellement, à l’issue d’une POE, les personnes concernées et l’employeur peuvent conclure un CDI ou un contrat de professionnalisation d’une durée minimale de 12 mois, un contrat d’apprentissage ou un CDD d’une durée minimale de 12 mois. Le texte prévoit désormais que le contrat de professionnalisation pourra être conclu à durée indéterminée ou pour une durée supérieure ou égale à six mois.
L’article L.6331-38 du code du travail prévoit que le taux de cotisation formation pour les entreprises est fixé par accord entre les organisations professionnelles d’employeurs et les organisations syndicales représentatives au niveau national dans le secteur du BTP. L’avant-projet de loi précise qu’à défaut d’accord, le taux de cotisation sera fixé par la loi.
L’avant-projet de loi modifie certaines des règles applicables au travail de nuit.
L’article L.3122-2 du code du travail prévoit que « tout travail effectué au cours d’une période d’au moins 9 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures est considéré comme du travail de nuit. La période de travail de nuit commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures ».
L’article L.3122-3 du code du travail précise que par dérogation à cette règle, la période de travail de nuit est d’au moins sept heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures s’agissant des activités de production rédactionnelle et industrielle, de presse, de radio, de télévision, de production et d’exploitation cinématographiques, de spectacles vivants et de discothèque.
L’avant-projet de loi ajoute à cette liste les commerces de détail alimentaire situés en dehors des zones touristiques internationales.
Pour bénéficier de cette dérogation, les commerces de détail alimentaire devront être couverts par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord collectif de branches comprennent les contreparties dont bénéficient les salariés qui travaillent entre 21 heures et minuit et le début de la période de travail de nuit, ainsi que les mentions obligatoires prévues aux alinéas 3 à 7 de l’article L.3122-15 du code du travail.
L’avant-projet de loi précise que les accords d’intéressement pourront être conclus pour une durée comprise entre un et trois ans (et non plus seulement trois ans).
La loi Avenir professionnel a ouvert la possibilité, à titre expérimental, de conclure un seul CDD ou un seul contrat de travail temporaire pour remplacer plusieurs salariés. La période d’expérimentation qui devait s’achever le 31 décembre 2020 est prolongée jusqu’au 1er juin 2021. Il faut dire que le décret d’application devant fixer les secteurs concernés n’a toujours pas été publié.