Interrogé par des membres du CE sur un projet de licenciement disciplinaire, l’employeur qui répond lors d’une réunion du personnel que sa décision est irrévocable, alors même que l’entretien préalable n’a pas encore eu lieu, se met en tort. Ce licenciement est alors dépourvu de cause réelle est sérieuse.

Lorsqu’il est interpellé par les élus sur un cas individuel, l’employeur doit faire preuve de discernement. Car tout ce qui est dit en réunion devant le personnel, puis retranscrit par des élus dans un compte-rendu, pourra être retenu contre lui…

Les élus montent au créneau pour soutenir leur collègue menacé d’éviction
Après 37 années au sein de l’entreprise Cegelec Elmo, un directeur est convoqué le jour du réveillon de Noël 2008 à un entretien préalable au licenciement, prévu le 5 janvier suivant. Informés de ce projet de sanction, les élus de l’entreprise soutiennent spontanément leur collègue et sollicitent une réunion avec la direction générale. Cette réunion du personnel se tient le 5 janvier en début d’après-midi, avant l’entretien préalable, en présence du directeur EDF de Cegelec Paris et du directeur général d’Elmo. Lors de cette réunion, le directeur de département EDF indique que la décision de rompre le contrat de travail est irrévocable, en précisant qu’il s’agit d’un conflit de personnes. Cette affirmation est retranscrite dans un compte-rendu signé par quatorze salarié, dont quatre membres du comité d’entreprise.
L’employeur exclut tout retour en arrière
Le 8 janvier, le salarié est licencié pour faute grave. Ce dernier agit alors aux prud’hommes et estime que les propos tenus par sa direction devant ses collègues équivaut à un licenciement verbal avant tout entretien préalable, par nature irrégulier. En défense, l’employeur expose qu’acculé par les représentants du personnel informés de la procédure de licenciement en cours, il s’est borné à affirmer que sa « démarche » était irrévocable, confirmant ainsi sa décision de poursuivre la procédure engagée, sans présager de sa décision ultime à la suite de l’entretien préalable.
Mais pour les juges, l’employeur s’est trop livré devant les élus. Une lecture confirmée en cassation : « C’est par une interprétation nécessaire, exclusive de dénaturation, du compte-rendu de la réunion du personnel, que la cour d’appel a retenu que l’employeur avait annoncé publiquement, avant la tenue de l’entretien préalable, sa décision irrévocable de licencier le salarié, retient la Haute Cour. Elle en a exactement déduit l’existence d’un licenciement verbal dépourvu de cause réelle et sérieuse ».
 

Rappelons que tout licenciement individuel doit être précédé d’un entretien préalable. Celui-ci est obligatoire quels que soient l’effectif de l’entreprise et l’ancienneté du salarié. Et à l’issue de cet entretien, la loi impose un délai de réflexion d’au moins deux jours à l’employeur pour prévenir toute décision hâtive. L’inobservation de ce délai constitue alors une irrégularité de forme, mais qui n’affecte pas la validité du licenciement (lire l’arrêt du 18 octobre 2000).

S’agissant du licenciement verbal, celui-ci apparaît hors toute procédure normale de licenciement, et justifie à lui seul l’absence de caractère réel et sérieux du renvoi.

Source – Actuel CE