A partir de septembre 2018, les sociétés Orange et Orange Caraïbes annoncent un projet de déménagement des locaux de l’établissement secondaire Direction de l’exploitation du système d’information (DESI), situés dans le 12e arrondissement de Paris (avenue Daumesnil), vers un nouveau site dénommé New Villejuif, situé dans la commune de Villejuif (Val-de-Marne). Le transfert des salariés concernés est prévu pour le quatrième trimestre 2020.
Le 28 mai 2019, le CHSCT de l’établissement DESI vote le recours à une expertise en invoquant l’existence d’un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. A la demande des directions d’Orange et d’Orange Caraïbes, le président du tribunal de grande instance annule la délibération du CHSCT du 28 mai 2019.
Un stade « insuffisamment avancé »
Pour le juge, à cette date, compte tenu de l’état d’avancement du projet immobilier et de la procédure d’information/consultation du CHSCT, il était encore trop tôt pour pouvoir qualifier le projet de déménagement et de regroupement de « projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ». « Le stade insuffisamment avancé des principales modalités de ce projet immobilier de déménagement avec transfert de personnels » ainsi que l’inachèvement de la procédure prévue par un accord méthodologique pour la conduite des grands projets immobiliers du 10 avril 2013 ne permettaient pas « de qualifier ce projet de projet important à la date de cette réunion du 28 mai 2019 ». Donc, pas de projet important, pas d’expertise possible.
► Remarque : cet accord collectif prévoyait trois étapes respectivement intitulées « Enjeux et organisation du projet », « Expression des besoins futurs, analyse des métiers, activités et programmation » et « Conception générale et détaillée des aménagements ». Pour le juge, la réunion du 28 mai 2019 ne pouvait pas constituer la troisième étape nécessitant la consultation des instances représentatives du personnel avec présentation de la conception détaillée des aménagements. D’où le caractère prématuré de la décision d’organiser une expertise.
L’affaire arrive en cassation. Le CSE, entre-temps mis en place, reprend l’affaire et fait notamment valoir que « l’appréciation de l’importance d’un projet de déménagement ne dépend pas de l’état d’avancement de la construction des nouveaux locaux et de leur aménagement mais des répercussions effectives du changement de lieu de travail sur les conditions de travail des salariés ». Et d’ajouter que l’état d’avancement de la procédure de consultation du CHSCT n’avait pas à être pris en compte pour apprécier l’importance du projet.
« Le processus décisionnel était acquis »
La décision du président du tribunal de grande instance d’annuler la délibération du CHSCT est cassée par la Cour de cassation dans son arrêt du 12 mai 2021 (lire en pièce jointe). Comme cela avait été constaté, « le processus décisionnel relatif au regroupement et au déménagement des salariés du site de Paris-Daumesnil sur ce nouveau site de Villejuif était acquis » et « les sociétés convenaient que le projet serait à terme un grand projet immobilier ayant pour effet de générer une redistribution significative des espaces de travail et de leur usage pour les salariés concernés ». D’où, a priori, l’existence d’un projet d’aménagement important modifiant les conditions de travail et permettant, de ce fait, une expertise.
Source : Actuel-CE